A peine l'euphorie des Jeux olympiques retombée, le groupe bancaire partenaire de l'événement, BPCE, aborde une rentrée agitée. Mais le groupe peine à convaincre sur son plan stratégique et est attendu au tournant par les syndicats.

Compte tenu des objectifs ambitieux du plan dévoilé fin juin (en vrac 800 000 nouveaux clients particuliers d'ici 2026, position de numéro 1 sur le marché des professionnels et entreprises en 2030...), les représentants syndicaux du groupe rassemblant notamment les Caisses d'épargne, les Banques populaires et Natixis, attendent un geste financier de la direction lors des prochaines négociations annuelles obligatoires (NAO), qui commencent en septembre.

Les salariés sont pour l'instant les « grands oubliés » du plan, estime le représentant syndical de Sud-Solidaires Alain Quesne, qui déplore les rotations importantes d'effectifs et la fermeture programmée d'agences.

Les réseaux sont « déjà mis sous pression », souligne Emmanuel Verhague, délégué syndical CFTC, et pas en meilleure posture pour « augmenter la cadence ».

Quel lest lâchera BPCE en augmentation de salaires ? Le groupe a en tout cas prouvé en avril qu'il avait de la ressource en annonçant débourser 1,1 milliard d'euros pour s'emparer d'activités de financements spécialisés de la Société Générale, effectuant ainsi la plus grosse acquisition de sa jeune histoire.

M. Verhague attend aussi des réponses autour de l'utilisation de l'intelligence artificielle et son impact futur sur l'emploi.

L'intégration de l'IA dans les « processus bancaires » (assistance conseillers, crédits, recouvrement, fraudes) est un des éléments clés du plan « Vision 2030 ».

Ambitions contrariées

En externe, c'est l'ambition de BPCE en matière de lutte contre le réchauffement climatique qui ne convainc pas.

« Rien n'est dit sur la sortie des énergies fossiles », le groupe « a définitivement mis au placard son ambition en matière climatique », déplore l'ONG Reclaim Finance, « alors qu'il accuse déjà un retard par rapport aux autres groupes bancaires français ».

Côté financier, le plan comporte des chiffres déjà atteints, notamment en termes de solidité, ou en dessous de ce qui avait été promis (et pour l'instant pas atteints) en 2021 pour 2024.

Sous l'égide du précédent président du directoire Laurent Mignon et se basant sur des hypothèses économiques présentées comme prudentes, BPCE visait par exemple un résultat net supérieur à 5 milliards d'euros cette année.

Avec seulement un tiers du chemin parcouru entre janvier et juin (1,68 milliard d'euros), la banque en est loin. Elle promet dorénavant « environ » 5 milliards d'euros de résultat net mais cette fois-ci en 2026.

Le groupe né pendant la crise financière de 2008 reste tiraillé en interne : faire du violet en mélangeant des « bleus » (les Banques populaires) et des « rouges » (Caisses d'épargne), concurrents sur le terrain, demande du doigté de la part du nouveau président du directoire Nicolas Namias.

Entre centralisation et autonomie des caisses régionales, il joue pour l'instant la carte du « en même temps » : d'un côté une bride plus lâche pour des acquisitions tactiques (la banque belge Nagelmackers par la Caisse d'Epargne Hauts-de-France, une filiale de banque de détail à Madagascar par la Bred), de l'autre des « synergies » qui avancent à grands pas.

L'heure des choix

« Aujourd'hui chaque réseau garde sa manière de fonctionner et son identité avec ses marges de manœuvre, mais qu'en sera-t-il demain ? » s'interroge M. Verhague.

Le groupe doit notamment statuer sur le rapprochement de ses systèmes d'informations, sur fond de délocalisation de services informatiques au Portugal, alimentant la gronde des salariés concernés.

BPCE doit également prendre une décision en matière de paiements : continue-t-il sur sa lancée en distribuant des cartes bancaires « Visa only » (uniquement Visa, 4 millions en circulation) ou se range-t-il derrière le groupement d'intérêt économique (GIE) Cartes bancaires (CB), dont il fait partie ?

La lecture du plan stratégique ménage les deux scénarios : d'un côté la mise en avant de partenariats industriels avec des leaders privés, de l'autre une « contribution à la souveraineté (...) en renforçant CB ».

La banque, moins diversifiée que ses concurrentes, devra également défendre ses positions sur la gestion d'actifs pour faire face à l'appétit d'un groupe BNP Paribas qui souhaite doubler de taille.

Empêtré dans l'affaire d'évasion fiscale « cumcum » via Natixis, le groupe qui assure « coopérer avec les autorités » devra enfin se sortir des discussions avec le Parquet national financier sur le sujet.