Le Parlement a acté définitivement jeudi, par un ultime vote à l'unanimité du Sénat, une revalorisation des petites retraites des conjoints collaborateurs d'agriculteurs, surtout des femmes, portée par le chef de file du groupe communiste à l'Assemblée André Chassaigne.

Le Sénat à majorité de droite a adopté sans modification la proposition de loi de M. Chassaigne, votée également à l'unanimité en juin par l'Assemblée nationale. Elle avait été inscrite à l'ordre du jour de la Haute assemblée dans le cadre d'une "niche" réservée au groupe CRCE à majorité communiste.

Les "conjoints collaborateurs" d'exploitants agricoles perçoivent aujourd'hui une retraite de 604 euros par mois en moyenne, quand ils ont validé 150 trimestres, et 307 euros dans les autres cas. La proposition de loi prévoit, par une série de mesures techniques, une revalorisation pour les retraités actuels et futurs, dont le montant variera en fonction des situations.

En 2022, ces mesures bénéficieraient à 214 000 pensionnés, dont 67% de femmes. Les 70 000 femmes ayant accompli toute leur carrière en qualité de conjoint collaborateur verraient leur pension augmenter de 100 euros par mois en moyenne, selon la rapporteure du texte au Sénat Cathy Apourceau-Poly (CRCE).

Le secrétaire d'Etat chargé des retraites Laurent Pietraszewski a salué dans l'adoption de ce texte "le reflet d'un véritable consensus républicain en faveur d'une revalorisation des retraites agricoles". Le texte limite en outre à cinq ans le recours au statut de conjoints collaborateurs. Pour le ministre, il s'agit d'"inciter au travail sous des formes rémunératrices, conjoints associés ou salariés", garants d'une meilleure couverture sociale.

Le ministre a promis "un déploiement rapide" de la réforme, malgré la nécessité d'"un "lourd travail technique". "Les droits ouverts le seront bien au titre des périodes courant à partir du 1er janvier prochain", a-t-il assuré.

Une reconnaissance qui "vient trop tard"

Cette revalorisation "va dans le sens de la justice sociale et de la reconnaissance du monde agricole dans son ensemble", a estimé Cécile Cukierman (CRCE), tandis que Serge Mérillou saluait "un rayon de soleil dans un monde qui a été bien triste pour eux".

"Cette reconnaissance vient trop tard", pour Laurent Duplomb (LR), chaleureusement applaudi après avoir raconté l'histoire de Juliette, grand-mère de son épouse, "née en 1920 en Haute-Loire" et qui a "fini sa vie" en 2011 avec une retraite de 555 euros. "Toute sa vie elle n'aura jamais bien gagné sa vie (...), cette reconnaissance vient saluer cet effort, ces douleurs, ce travail", a-t-il conclu.

En juin 2020, André Chassaigne avait déjà obtenu un vote unanime pour relever les retraites des anciens chefs d'exploitation agricole à un niveau plancher de 85% du Smic net (au lieu de 75%), soit 1 035 euros. "Coïncidence heureuse du calendrier", selon M. Pietraszewski, les effets de cette revalorisation intervenue en vigueur au 1er novembre "commencent à être visibles depuis ce matin sur le compte en banque des retraités bénéficiaires". "Ce sont plus de 200 000 agriculteurs qui bénéficient d'une hausse de pension de 102 euros en moyenne par mois", a-t-il ajouté.

« Engagement tenu ! Fier du travail accompli avec nos parlementaires et du consensus politique qui s'est dessiné pour revaloriser les retraites de nos agriculteurs et leurs conjoints. Ils doivent pouvoir vivre décemment des fruits de leur travail », a tweeté le Premier ministre Jean Castex. La FNSEA a salué de son côté « un premier pas décisif ». Pour la première organisation agricole, « le combat continue néanmoins pour obtenir une revalorisation des retraites des membres de la famille à carrière complète à hauteur de 75% du Smic (913 euros par mois) ».