Les débats et votes à l'Assemblée nationale prennent une tournure déroutante. La composition de l'hémicycle est si fragmentée que la bascule des votes change au gré des présences des députés des différents groupes.
Plus tôt dans la semaine, les groupes du Nouveau Front populaire (NFP) ont échoué à augmenter le taux de la flat tax sur les revenus du capital. Plus tôt ce vendredi 25 octobre au matin, le NFP a aussi échoué à rétablir l'impôt sur la fortune... Surprise, donc, ce vendredi en milieu de matinée avec l'adoption de l'amendement LFI-NFP instaurant un impôt sur le patrimoine des milliardaires. Les députés de l'alliance de gauche sont cette fois parvenu à obtenir la majorité - grâce aux absences parmi les autres groupes parlementaires - et à faire voter ce nouvel impôt.
« Une taxe annuelle de 2% sur la partie des patrimoines supérieure à un milliard d'euros »
Concrètement, cet amendement crée un nouvel « impôt sur les grandes fortunes patrimoniales ». Il s'agit de taxer chaque année de 2% les très grandes fortunes : « L'impôt est calculé en appliquant à la fraction de patrimoine qui excède 1 000 000 000 € le taux de 2% ».
« 13,6 milliards d'euros de nouvelles recettes »
Cette mesure repose sur les travaux de l'économiste Gabriel Zucman, directeur de l'Observatoire européen de la fiscalité. Il milite de longue date pour une impôt ciblant le « club des milliardaires », au nombre de 3 000 dans le monde, dont 75 Français : « Il faut une taxe minimale sur les milliardaires mondiaux », expliquait l'économiste sur France Info à l'automne dernier. « On propose une taxe de 2%. Ce serait quand même plus que ce qu'ils paient aujourd'hui. Et en même temps, ça resterait modeste par rapport au taux de croissance de la fortune des milliardaires qui a été en moyenne de 7% par an depuis les années 1990. »
« Cet impôt Zucman permettrait de dégager 13,6 milliards d'euros de nouvelles recettes », affirme la députée LFI Mathilde Feld et les cosignataires de cet amendement dans l'exposé des motifs.
« Un impôt qui n'existe nulle part ailleurs »
Un amendement qui a peu de chances de survivre au 49.3
En séance, le ministre chargé du Budget Laurent Saint-Martin s'est dit totalement opposé à ce nouvel impôt : « J'ai du mal à comprendre comment l'ensemble des amendements précédents ont été rejetés [notamment le rétablissement de l'ISF, NDLR] et celui-là adopté. C'est tout simplement un impôt qui n'existe nulle part ailleurs. Qui va ponctionner à hauteur de 13 milliards d'euros le patrimoine. On n'est même pas dans le rétablissement de l'ISF, c'est le meilleur moyen de faire fuir [les capitaux] », s'est emporté Laurent Saint-Martin.
Cet amendement ne sera donc clairement pas retenu par le gouvernement en cas de 49.3. Ni même, en l'absence de 49.3, d'être retenu en cas de commission mixte paritaire, la droite ayant la majorité au Sénat.
Salaire, retraite, patrimoine... Et si vous étiez « riche » sans le savoir ?