Depuis ce début d'année 2025, la rengaine est si insistante qu'elle dépasse probablement le simple technique du « ballon d'essai » : l'abattement de 10% automatiquement attribué aux retraités serait menacé. Mis en place en 1978, cet abattement a été créé « pour pondérer la fiscalité des retraités » dont les revenus « échappaient à tout risque de sous-déclaration », explique le syndicat Unsa Retraités sur son site internet. Début janvier, l'économiste Gilbert Cette, président du Conseil d'orientation des retraites, avait mis le feu aux poudres en évoquant la piste d'une suppression de l'abattement fiscal de 10% sur les retraites.

En 2025, « l'administration fiscale applique automatiquement un abattement de 10% sur le montant total déclaré des pensions »

Si l'idée est dans les tuyaux, pas de panique à court terme : elle ne concernera dans tous les cas pas la déclaration 2025 des revenus 2024. Le site impots.gouv.fr rappelle d'ailleurs que « l'administration fiscale applique automatiquement un abattement de 10% sur le montant total déclaré des pensions. Le montant de l'abattement doit se situer dans la fourchette suivante : Minimum : 450 € par pensionné ; Maximum : 4 399 € par foyer fiscal ».

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« Pour l'heure, l'abattement est maintenu pour la taxation des revenus 2024, rien n'empêche toutefois qu'une loi des finances pour le budget 2026 n'impacte les revenus déclarés en 2025 », déclare Jean-Yves Mercier, vice-président du Cercle des fiscalistes, dans Les Echos.

Que changerait la suppression de l'abattement de 10% ?

Selon une note de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) parue début janvier, « cette suppression se traduirait, selon la Cour des comptes, par une hausse de l'impôt sur le revenu des retraités de 4,5 milliards d'euros ».

Concrètement, selon les simulations de l'OFCE, pour un ménage de retraités déclarant jusqu'à 19 500 euros de revenus annuels, la suppression de l'abattement ne conduirait à aucun surplus de taxation, du moins sur le strict aspect de l'impôt sur le revenu. La hausse du revenu fiscal de référence (RFR) pourrait en revanche conduire à des effets de bord (lire ci-dessous), que les politiques devraient anticiper si jamais ils décidaient de supprimer cet abattement.

La donne est totalement différente pour des revenus dépassant 25 500 euros : l'impact serait immédiat sur l'impôt sur le revenu. Pour des revenus oscillant entre 25 500 et 27 000 euros, selon les estimations de l'OFCE, le surplus s'élèverait en moyenne à 130 euros, 300 euros entre 30 000 et 31 500 euros et 860 euros à partir de 95 500 euros de revenus déclarés.

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De possibles effets pervers

Quels seraient les effets de bord liés à la hausse du RFR de l'ensemble des retraités ? Une telle mesure impacterait aussi le taux de CSG appliqué sur les pensions de retraite, calculé en fonction du revenu fiscal de référence. « Il y aurait un nombre considérable de retraités qui par l'accroissement du revenu fiscal de référence verraient leur taux de CSG s'aggraver, explique Jean-Yves Mercier. Ceux bénéficiant d'un taux de CSG à 0% pourraient voir celui-ci grimper à 3,8%. Ceux à 3,8% pourraient passer à 6,6%. Enfin ceux relevant d'un taux à 6,6% atteindraient 8,3% ».

Retraite 2025 : votre taux de CSG, si votre RFR dépasse...
Parts fiscalesCSG à 3,8%
+ CRDS
CSG à 6,6%
+ CRDS
+ CASA
CSG à 8,3%
+ CRDS
+ CASA
1 part (personne seule)12 817 €16 755 €26 004 €
2 parts (couple)19 661 €25 703 €39 886 €
Demi-part supplémentaire
(personne à charge)
+ 3 422 €+ 4 474 €+ 6 941 €

RFR à prendre en compte : avis d'impôt 2024 sur les revenus 2023.
CRDS à 0,50% et CASA à 0,30% dans tous les cas.
Seuils valables en métropole. Barème détaillé sur L'Assurance retraite.

Enfin, « le second effet de bords concerne la taxe foncière sur l'habitation principale », explique encore le vice-président du Cercle des fiscalistes aux Échos. Les retraités de plus de 75 ans dont le revenu fiscal de référence est inférieur à 12 455 euros sont actuellement exonérés. Ce plafond peut être augmenté de 3 326 euros pour chaque demi-part constituant le foyer fiscal, soit jusqu'à 19 107 euros pour un couple de retraités, dont une des deux personnes a dépassé les 75 ans. Si l'abattement était supprimé, certains retraités seraient au-delà du plafond.

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