L'essentiel
- La commercialisation des produits financiers structurés auprès des particuliers en France s'intensifie, avec une collecte brute passant de 23 milliards d'euros en 2021 à environ 42 milliards en 2023.
- Ces produits, promettant un rendement élevé sur une durée définie, attirent les épargnants cherchant une exposition plus contrôlée au risque, mais requièrent un placement de longue durée et présentent un risque de coûts élevés en cas de retrait anticipé.
- Pour investir intelligemment dans les produits structurés, les épargnants doivent prendre en compte la durée d'échéance maximale, la protection du capital offerte et s'assurer qu'ils comprennent les scénarios possibles de rendements et de risques.
Les produits structurés suscitent l'enthousiasme de nombreux épargnants. Selon un rapport de l'Autorité prudentiel et de résolution (ACPR) paru en avril, « la commercialisation des produits structurés en France auprès d'une clientèle de particuliers est très dynamique ». La collecte brute est en effet passée de 23 milliards d'euros à fin 2021 à près de 42 milliards d'euros en 2023. L'essentiel de la collecte porte sur l'assurance vie : « 80% contre 20% en offres au public et comptes-titres », précise encore l'ACPR.
Les produits structurés, aussi appelés fonds à formule, promettent à leur détenteur un objectif de rendement élevé, sur une durée définie à l'avance et misent sur la performance à venir d'un indice boursier (comme l'EuroStoxx 50 ou le CAC 40), tout en protégeant, sous conditions, le capital investi à échéance. Ces actifs sont accessibles en direct via des comptes-titres ou le PEA mais aussi au sein des contrats d'assurance vie ou de Plan épargne retraite (PER) sous forme d'unités de compte (UC).
Avec 6% voire même 7% de rendement et alors que le taux du Livret A est passé à 1,70% en août (et devrait encore baisser au 1er février prochain), les produits structurés représentent-ils une véritable aubaine, et une alternative sûre pour l'épargnant ?
Un très bon rendement mais un produit qui ne s'adresse pas à tous les profils d'épargnant
« Les produits structurés s'adressent notamment aux épargnants avec un profil de risque plus modéré ou qui souhaitent avoir une exposition un peu plus contrôlée au risque », explique Valentine Demaison, directrice générale de Mon Petit Placement.
Les fonds à formule sont majoritairement composés d'une part obligataire, permettant de garantir à l'échéance le capital investi et d'une part en produits risqués dont la valeur fluctue selon l'évolution des marchés. « Le produit structuré a l'immense avantage d'offrir des revenus réguliers fixes grâce au coupon obligataire. A l'inverse, la valeur de l'action va dépendre des années. En France, l'OAT 10 ans est autour de 3%. Dans la zone euro, on est autour de 3,2%. Donc il y a enfin la possibilité d'avoir des portefeuilles obligataires et des produits structurés qui en sont des dérivés, avec des rendements attractifs », ajoute Valentine Demaison.
En contrepartie d'une rémunération très alléchante, l'épargnant doit accepter certaines conditions et notamment de placer son argent pour une durée plutôt longue. En effet, la durée de vie maximum d'un produit structuré oscille entre huit et dix ans. Il existe plusieurs types de fonds à formule :
- Les fonds à capital garanti qui, comme son nom l'indique, garantit à l'épargnant de récupérer son capital à échéance ;
- Les fonds à capital protégé : Ici, seule une partie du capital est garanti.
- Les fonds à promesse : le capital n'est jamais garanti mais une performance minimale est promise même cas de baisse de l'indice ;
- Les fonds autocall : le capital est le plus souvent garanti et remboursé aux investisseurs avant l'échéance maximum du fonds.
Les fonds autocall, les produits structurés les plus répandus
« Les fonds autocall sont les plus répandus car ils ne nécessitent pas une grande ingénierie financière », rappelle Valentine Demaison.
L'objectif de ce type de fonds : rembourser le capital accompagné d'une rémunération avant l'échéance maximum du fonds. Pour cela, des fenêtres de remboursement anticipé sont mises en place tous les ans, tous les trimestres ou encore tous les semestres.
Ainsi, si l'indice boursier de référence atteint son objectif lors de l'une de ces échéances, « l'autocall » s'active automatiquement : l'épargnant perçoit alors des coupons, soit le capital placé (net des frais de souscription) majoré d'une plus-value indexée sur l'évolution de cet indice boursier.
« Si le produit a une durée de vie de 10 ans et qu'il existe une clause de rappel anticipée dans 3 ans, donc peut-être que mon investissement ne durera que 3 ans. L'investisseur est donc rassuré face à une durée de vie du produit qui peut être un peu longue », précise la directrice générale de Mon Petit Placement.
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Pour quels risques ?
« La liquidité de ce produit est assez faible ou en tout cas il existe une rigidité temporelle »
« Le produit structuré est le seul type d'actif pour lequel tous les scénarios sont envisagés à l'avance. À la souscription, l'investisseur ne peut pas savoir dans quel scénario il sera à l'échéance du produit. Mais c'est une construction financière qui vous permet d'avoir sur la table tous les scénarios possibles des dix prochaines années, et de savoir au moment où vous signez ce que vous aurez in fine dans chacun de ces scénarios », rappelle Valentine Demaison.
Pourtant, ce produit a quand même des inconvénients.
Risque de défaut de l'émetteur. L'émetteur est le plus souvent une banque. Le risque de défaut est donc faible, mais il existe. Même si des garanties existent pour protéger les épargnants. Toutes les banques en France adhèrent au Fonds de garantie des dépôts et de résolution (FGDR) qui protège les titulaires de comptes bancaires. Chaque client est protégé à hauteur maximum de 100 000 euros par établissement, pour plusieurs catégories de produits : 100 000 euros pour vos avoirs dans la banque sur votre compte courant, vos livrets « classiques », votre PEL ou PER.
Par ailleurs, les sommes versées par les épargnants sur leurs contrats d'assurance vie sont garanties à hauteur de 70 000 euros par déposant et par société d'assurance, et ce, quel que soit le support (fonds euros ou unités de compte) sur lequel elles sont placées.
La complexité et le manque de transparence et de lisibilité. L'Autorité des marchés financiers (AMF) met en garde les épargnants : « Certains placements à formule semblent tout à la fois offrir une perspective de rendement intéressant et un faible risque. » Cependant, comme le précise l'AMF, le scénario favorable détaillé dans la brochure ne se réalise pas systématiquement. Ainsi, dans certains cas, « si le scénario est défavorable, le capital n'est pas garanti à l'échéance et la perte peut être importante ».
La liquidité. « La liquidité de ce produit est assez faible ou en tout cas il existe une rigidité temporelle. Il est évidemment possible de faire un rachat anticipé mais il peut s'avérer coûteux pour l'investisseur. En effet, le rachat se fait à la valeur du marché au moment de la demande et il y a donc un risque de décote important. Par ailleurs, des frais de sortie sont à prévoir. L'épargnant peut sortir de ce type de produit mais pas toujours sans y laisser des plumes », prévient Valentine Demaison. Le frais de sortie anticipée, aussi appelés commission de rachat, peuvent s'élever jusqu'à 4%.
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Comment les choisir ?
Si l'épargnant souhaite tout de même investir une partie de son capital dans les produits structurés, à quoi devra-t-il faire attention pour bien les choisir ? Selon la directrice générale de Mon Petit Placement, il est essentiel de « regarder la durée d'échéance maximum du produit, soit combien de temps mon argent peut-il être bloqué. L'épargnant aura également intérêt à vérifier s'il existe des mécanismes de rappel anticipé ».
Et aussi à scruter la protection du capital offerte. « Parfois, en haut de la feuille, il y a écrit protection en capital et puis on se rend compte que cette protection intervient seulement dans certaines conditions et que finalement, il existe davantage de scénarios où l'épargnant n'est pas protégé en capital que l'inverse », ajoute Valentine Demaison.
« Être sûr d'avoir compris la formule elle-même et ce que sont les différents scénarios »
Autre point d'attention ? Les scénarios envisagés : « Être sûr d'avoir compris la formule elle-même et ce que sont les différents scénarios. Dans quelles conditions de marché on se retrouve dans le scénario 1, le scénario 2 ou encore le scénario 3 » insiste Valentine Demaison. « Une possibilité de performance élevée s'accompagne toujours d'un risque élevé », rappelle de son côté le gendarme boursier.
Les fonds structurés sont-ils une véritable aubaine ?
Les produits structurés offrent une promesse de rendement élevée. Mais à l'image de tous les placements avec un risque de capital, les produits structurés ne remplacent pas un Livret A pour son épargne de précaution puisque l'argent est disponible à tout moment, net d'impôt. « L'épargnant qui détient des livrets d'épargne trop remplis, avec le taux des livrets qui baisse, a intérêt à ouvrir la porte de l'investissement pour aller réellement chercher une croissance à long terme de son capital », suggère Valentine Demaison.
Toutefois, selon l'épargne disponible et son appétence au risque, de nombreux autres placements existent : livrets bancaires, comptes à terme, fonds euros de l'assurance vie... « L'épargnant va avoir tout un tas de supports à sa disposition qu'il faut toujours regarder sous l'angle « horizon de placement et risque » mais aussi en fonction de sa surface financière. Pour quelqu'un qui a 15 000 euros sur son livret et qui n'a rien d'autre, il y a des choses à faire avant d'aller sur un produit structuré », conclut Valentine Demaison.