L'essentiel
- Selon l'économiste Cyril Blesson, les investissements français en placements financiers devraient légèrement augmenter, à environ 120 milliards d'euros en 2025.
- La baisse des taux d'intérêt pourrait affecter les dépôts à terme et le Plan épargne logement, et les placements réglementés comme le Livret A et le LDDS.
- L'assurance vie devrait tirer son épingle du jeu, avec une collecte nette positive attendue, tandis que l'investissement en titres risque de stagner après une année boursière médiocre en 2024.
110 milliards d'euros en 2023, 117 milliards d'euros en 2024... En 2025, les flux d'argent frais orientés par les Français vers les placements financiers devraient continuer à se redresser, sans atteindre les sommets atteints après la fin de la phase aigüe de la pandémie de covid.
C'est en tout cas le pronostic de Cyril Blesson, économiste et associé au sein du cabinet PAIR Conseil. « La faiblesse du crédit immobilier devrait continuer à peser sur les placements des ménages », explique l'économiste qui coproduit les Cahiers de l'Epargne PAIR Conseil. Moins de crédits immobiliers signifie, en effet, moins de biens vendus, et donc moins de transferts du patrimoine immobilier des vendeurs vers les placements financiers. En résumé, ce sont les crédits qui font les dépôts, et les crédits restent déprimés.
Cela pourrait-il changer en 2025 ? L'incertitude demeure, souligne l'économiste : « Nous restons très prudents sur la perspective d'un rebond en 2025. Le potentiel de relance est là, mais tout dépendra du niveau des taux longs et du choix, ou non, des banques de baisser leurs marges. »
Résultat : en 2025, Cyril Blesson s'attend à voir les placements financiers des ménages « en très légère hausse, autour de 120 milliards d'euros ». Quels sont les placements qui vont en profiter ? Tour d'horizon.
Des placements affectés par la baisse des taux
L'année 2025 commence mal pour l'épargne réglementée. Le Livret A et le LDDS vont enregistrer une baisse de leur taux, de 3% à 2,40%, une première depuis 5 ans, et perdre un peu de l'attractivité qui ont fait leur succès depuis 2022. Les autres produits d'épargne réglementée vont suivre : de 4% à 3,5% pour le LEP, de 2,25% à 1,75% pour le PEL... Tous pâtissent de la conjonction de deux phénomènes : le repli de l'inflation, passée en moyenne annuelle de 4,9% en 2023 à 2% en 2024 ; et son corollaire, la baisse des taux courts interbancaires sous influence du changement de politique monétaire impulsée par la Banque centrale européenne, justement, pour contenir la surchauffe des prix.
Livret A, LEP, LDDS, PEL... Voici tous les taux officiels de l'épargne réglementée pour 2025
C'est d'ailleurs le Plan Epargne Logement, déjà en grande souffrance, qui devrait pâtir le plus de cette baisse, avec une décollecte nette de l'ordre de 20 milliards d'euros, estime Cyril Blesson.
Le Livret A et ses cousins, toutefois, profiteraient moins de la fonte du stock des dépôts à vue qui se tasse (l'argent de nos comptes courants) mais seraient soutenus par le climat économique anxiogène (caractérisé par une inflexion du marché du travail), favorable à l'épargne de précaution dont ils sont le réceptacle naturel.
La baisse des taux risque d'affecter plus directement les comptes à terme, beaucoup moins attractifs qu'en 2024, et les OPCVM monétaires, qui sortent de deux belles années, avec des collectes nettes proches des 7 milliards d'euros.
Une balance qui penche plutôt pour l'assurance vie
Selon Cyril Blesson, les livrets bancaires soumis à l'impôt auront, en revanche, « une carte à jouer » : « Les banques seront intéressées à collecter des dépôts et, donc, à proposer des taux attractifs ». Elles peuvent ainsi offrir des taux un peu plus intéressants en plaçant cet argent sur des obligations à long terme, comme les OAT émises par le Trésor français.
Evidemment, la situation économique du pays aura également un rôle à jouer. « Une dégradation pourrait soutenir l'épargne de bilan, les livrets notamment, utilisés par les ménages comme support d'épargne de précaution. Une embellie, en revanche, pourrait être plus favorable à l'assurance vie », estime Cyril Blesson.
L'assurance vie devrait, quoi qu'il en soit, tirer son épingle du jeu. Le placement favori des Français (près de 2 000 milliards d'euros investis), un peu en retrait ces derniers temps, a réussi une fin d'année 2024 remarquable, enregistrant, par exemple, une collecte nette de 4 milliards d'euros en novembre, un record depuis 2010.
Les fonds euros, en particulier, ont su arrêter l'hémorragie, et cela devrait se poursuivre en 2025. « Ils vont profiter de la stabilité des rendements en 2024, qui devrait se situer autour de 2,6% en moyenne, proches 2023. Nous anticipons donc, pour la première fois depuis 2019, une collecte nette positive de l'ordre de 5,5 milliards d'euros », annonce Cyril Blesson. « D'autant que les assureurs devraient maintenir les vannes ouvertes. C'est leur intérêt avec les taux actuels. L'assurance vie, par ailleurs, est un outil majeur de financement de la dette publique : dans le contexte actuel, le pouvoir va attendre des assureurs qu'ils jouent leur rôle. »
Assurance vie : le comparatif des meilleures offres
Pas d'engouement énorme autour de l'investissement en titres
Les supports en unités de compte, principal moteur de l'assurance vie depuis plusieurs années, ralentiraient un peu en 2025, avec une collecte nette attendue de 31,7 milliards d'euros, contre 34,5 milliards en 2024. Ils subiront « sans doute les difficultés des SCPI et du CAC 40 en 2024 », anticipe Cyril Blesson.
Cela devrait aussi se ressentir sur l'investissement en titres, hors UC. « La détention est très concentrée dans la population, donc cela dépendra du comportement des plus fortunés », explique l'économiste. « Mais nous n'attendons pas un engouement énorme, après une année boursière médiocre en France en 2024. »
Placement : faut-il miser (gros) sur la Bourse de Paris et le CAC 40 en 2025 ?
Les Français, en effet, ont tendance à fuir les actions sur la base des performances passées, sans chercher à profiter d'un éventuel rebond. « L'industrie paye aussi son manque de pédagogie : les actions restent pourtant le placement le plus performant sur longue période », rappelle Cyril Blesson. « Les plus jeunes épargnants n'ont pas connu la crise de 2008, d'où leur appétence pour la bourse (et les cryptos !) visible dans les travaux de l'AMF, sans que l'on soit certain d'une approche d'investissement à long terme pourtant clé. »