L'Assurance maladie priée de se serrer la ceinture : principale cause du creusement actuel du déficit de la Sécurité sociale, elle est appelée à ralentir de quatre à cinq milliards d'euros la croissance de ses dépenses dans le projet de budget de la Sécurité sociale 2025.

Selon l'avant-projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) transmis au Conseil d'Etat, consulté par l'AFP, le déficit de la branche maladie s'est creusé à 14,6 milliards d'euros en 2024, alors que le gouvernement prévoyait il y a un an un déficit limité à 8,5 milliards.

Ce dérapage explique pour une très large part le creusement du déficit de la Sécu, estimé en 2024 à 18 milliards - contre 10,5 milliards prévus il y a un an. L'avant-projet de loi prévoit de contenir le déficit 2025 à 15,7 milliards, grâce à des efforts conséquents. Selon plusieurs sources parlementaires et gouvernementales, le texte est encore susceptible d'évoluer jusqu'à la dernière minute, avant sa présentation ce jeudi à 18h en Conseil des ministres.

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La hausse de l'Ondam, l'objectif national des dépenses d'assurance maladie, sera contenue à +2,8%, après +3,3% en 2024. Mais cet objectif ne pourra être tenu que si des économies de quatre à cinq milliards d'euros peuvent être trouvées, selon les informations qui ont filtré, pour contenir l'inexorable tendance à la hausse des dépenses, poussées chaque année par l'inflation, le vieillissement de la population et la hausse des maladies chroniques.

Transfert aux complémentaires santé

Mercredi, lors d'un échange avec des députés du camp présidentiel, la ministre de la Santé Geneviève Darrieussecq a tracé les grandes lignes de ce PLFSS. Selon plusieurs élus présents, elle a précisé que plusieurs mesures, évoquées ces derniers jours dans la presse, feraient « normalement » partie du calcul.

Le gouvernement envisage notamment de réduire la part de l'Assurance maladie dans le remboursement des consultations médicales, les complémentaires santé augmentant simultanément leur part, pour que les patients continuent d'être remboursés comme avant. Mais 4% des Français - soit 2,5 millions de personnes selon l'Irdes (Institut de recherche et de documentation en économie de la santé) - ne bénéficient pas d'une complémentaire santé et verront leur reste à charge augmenter.

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En outre, la mesure revient dans les faits à faire payer les ménages, puisque les complémentaires, qui évaluent ce transfert de charges à plus d'un milliard d'euros, ne manqueront pas d'augmenter leurs tarifs, après déjà une hausse d'environ 8% en moyenne cette année. Le PLFSS prévoit aussi des baisses de tarifs des médicaments, et « un effort sur la pertinence des prescriptions médicales », notamment en matière de transports sanitaires de patients et d'analyses médicales.

Baisse de tarifs pour les laboratoires ou les radios ?

L'avant-projet de texte consulté par l'AFP prévoit notamment de réengager des discussions avec les laboratoires d'analyses biologiques et les radiologues en vue de baisses tarifaires, et de donner des armes à l'Assurance maladie pour réduire « unilatéralement » les tarifs en l'absence d'accord.

Le gouvernement envisage encore de rogner les indemnités journalières perçues en cas d'arrêt maladie. L'Assurance maladie rembourserait toujours les arrêts à hauteur de 50% du salaire journalier, mais dans la limite d'un plafond de 1,4 Smic, contre 1,8 aujourd'hui. Les entreprises, qui souvent compensent le reste à charge, devraient mettre la main à la poche, sauf pour les salariés dont les employeurs ne compensent pas, qui en feront directement les frais.

Mais les économies ne suffiront pas : à ce stade des discussions, le PLFSS prévoit aussi d'augmenter les recettes. Le gouvernement voudrait simplifier, limiter et répartir différemment les allègements de cotisations patronales, aujourd'hui fortement concentrés au niveau du Smic, pour inciter le patronat à augmenter les très bas salaires.

En outre, le nouveau cocktail d'allègements s'arrêterait à 3 Smic, contre 3,5 Smic aujourd'hui. La réforme permettrait d'engranger au moins 4 milliards d'euros. Cette mesure fait déjà bondir le patronat qui assure que qu'elle « détruira plusieurs centaines de milliers de postes ».