Le gouvernement va présenter son projet de loi de finances et son projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2025, ce jeudi soir, en conseil des ministres. Gel de la hausse des pensions de retraite, les plus fortunés mis à contribution, taxes sur les véhicules polluants, l'électricité... Voici les mesures confirmées, probables ou envisageables.
La hausse des pensions de retraite retardée
Confirmée. C'est la mesure qui fait le plus réagir. Initialement prévue le 1er janvier, la revalorisation des pensions de retraites a été décalée au 1er juillet 2025. Quelque 14 millions de retraités, affiliés à des régimes de base obligatoires, sont concernés par cette mesure, selon Service-Public.fr. Ces pensions sont revalorisées en fonction de la progression de la valeur moyenne de l'indice des prix à la consommation, hors tabac. Grâce à ce report, dont l'adoption sera toutefois périlleuse au Parlement, le gouvernement devrait économiser 4 milliards d'euros.
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Un effort demandé aux 65 000 plus fortunés
Confirmé, mais à préciser. Une contribution « exceptionnelle » va être demandée aux 65 000 foyers français « les plus fortunés », soit les 0,3% les plus riches. Sur France 2, Laurent Saint-Martin a cité l'exemple « d'un ménage sans enfant qui touche à peu près des revenus de 500 000 euros par an ».
Dans les statistiques de la DGFiP, en isolant les foyers dont le revenu fiscal de référence (RFR) dépasse 400 000 euros, pour l'impôt 2023 portant sur les revenus 2022, 66 850 foyers fortunés précisément ressortent. Un seuil cohérent avec l'exemple présenté par le ministre chargé du Budget. Selon les dernières informations des Echos, la contribution prendrait la forme d'un taux d'imposition minimal calculé sur le RFR, de minimum de 20%. Cette mesure pourrait rapporter 2 milliards d'euros.
Revenu fiscal de référence | Nombre de foyers fiscaux | Montant moyen de l'impôt par foyer fiscal |
---|---|---|
400 001 à 500 000 € | 22 081 | 97 143 € |
500 001 à 600 000 € | 12 269 | 120 135 € |
600 001 à 700 000 € | 7 345 | 142 735 € |
700 001 à 800 000 € | 4 783 | 164 211 € |
800 001 à 900 000 € | 3 488 | 184 496 € |
900 001 à 1 million € | 2 535 | 206 076 € |
1 à 2 millions € | 9 106 | 284 218 € |
2 à 3 millions € | 2 369 | 505 452 € |
3 à 4 millions € | 989 | 695 924 € |
4 à 5 millions € | 533 | 854 248 € |
5 à 6 millions € | 295 | 1 million € |
6 à 7 millions € | 227 | 1,2 million € |
7 à 8 millions € | 157 | 1,4 million € |
8 à 9 millions € | 129 | 1,5 million € |
Plus de 9 millions € de RFR | 544 | 4 millions € |
Ensemble de ces foyers aisés | 66 850 | 220 604 € |
Source : statistiques de la DGFiP sur l'impôt 2023 portant sur les revenus 2022.
Montant moyen de l'impôt par foyer fiscal calculé par MoneyVox.
Le prêt à taux zéro étendu
Confirmé, mais à préciser. Lors de sa déclaration de politique générale, Michel Barnier a annoncé vouloir « des mesures rapides pour l'investissement locatif et l'accession à la propriété, notamment pour les primo-accédants ». Ces derniers auront désormais accès au prêt à taux zéro (PTZ) sur tout le territoire.
Actuellement, ce prêt peut être accordé pour l'achat d'un logement neuf situé dans les zones « tendues », soit seulement 1 800 communes en France. En « zones détendues », le PTZ n'est accordé que pour les logements anciens. À la stricte condition de réaliser de lourds travaux énergétiques, à hauteur de 25% minimum du coût de l'achat du logement.
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Un livret d'épargne dédié à l'industrie
Confirmé, mais encore (très) flou. Pour soutenir la dynamique industrielle, le gouvernement envisage de créer un nouveau livret d'épargne dédié à l'industrie. En réalité, cette idée a déjà été évoquée en 2012 par Jean Marc Ayrault, alors Premier ministre. Et même en 2010 par Nicolas Sarkozy, qui voulait prendre le modèle du livret développement durable (aujourd'hui devenu le LDDS). Reste à savoir désormais quelle forme prendra le livret « version 2025 ». Mis à part l'annonce de Michel Barnier, aucun détail n'a été dévoilé concernant le taux de rémunération et la fiscalité associée.
Le malus pour les véhicules thermiques polluants plus sévère
Probable. Le seuil de déclenchement du malus CO2 pour les véhicules thermiques les plus polluants pourrait être abaissé, selon l'avant-projet de loi sur le financement de la sécurité sociale 2025, consulté par Contexte. Depuis janvier 2024, ce seuil est de 118 g de CO2 par km, qui correspond à une taxe de 50 euros. Dans le projet du gouvernement, il pourrait descendre « de 5 g dès 2025, puis de 7 g en 2026 et en 2027 ». Le montant maximal de la taxe grimperait également graduellement, de 10 000 euros par an, pour atteindre 90 000 euros en 2027.
Par ailleurs, la taxe au poids serait élargie. Le seuil de déclenchement devrait être abaissé de 100 kg à partir de 2026, à 1,5 tonne (contre 1,6 tonne jusqu'alors). Au global, ces mesures rapporteraient 316 millions d'euros à l'État, en 2025.
Le calendrier du DPE « adapté »
Probable, mais encore flou. Cette mesure pourrait rassurer de très nombreux propriétaires de passoires thermiques : le gouvernement envisage de « simplifier » le diagnostic de performance énergétique (DPE) et « d'adapter » son calendrier. Pour l'heure, les logements classés G ne pourront plus être loués à partir du 1er janvier 2025, puis les logements F à partir de 2028 et enfin les logements E à partir de 2034. Ces dates seront-elles repoussées ? Y aura-t-il d'autres ajustements ? Le gouvernement va probablement éclaircir ces points ce jeudi.
Une taxe sur l'électricité doublée ?
Probable, mais le montant reste à préciser. L'exécutif envisage d'augmenter la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE), aussi appelée Contribution au service public de l'électricité (CSPE), fraction perçue sur l'électricité ou encore accise sur l'électricité. Selon Les Echos, le gouvernement miserait sur un doublement de son montant.
Cette taxe est passée de 0,032 euro à 0,001 euro par KWh, entre février 2022 et janvier 2024, pour faire face à la crise de l'énergie. Le 1er février 2024, son montant a été rehaussé à 0,021 euro. Un retour au moins au niveau d'avant-crise est quasi certain pour février 2025. Mais le gouvernement envisage d'aller plus loin, en fixant un tarif à 0,040 euro ou 0,042 euro par kWh. L'État pourrait encaisser 6 à 7 milliards d'euros, contre 3 milliards habituellement.
La niche fiscal Airbnb supprimée ?
Possible. Les locations de courte durée proposées par des plateformes comme Airbnb ou Abritel jouissent aujourd'hui d'un réel avantage, dans un marché du logement tendu. Un propriétaire, dont les recettes locatives n'excèdent pas 77 700 euros pour les logements meublés, bénéficie d'un abattement de 50% sur le montant total des sommes encaissées (loyers, charges facturées au locataire et provisions pour charges). Et ce grâce au régime micro-BIC (bénéfices industriels et commerciaux). L'abattement passe à 71% pour les locations de chambres d'hôtes et meublés de tourisme classés, si les revenus ne passent pas la barre des 188 700 euros.
Budget 2025 : la niche fiscale Airbnb est-elle menacée ?
Cette niche fiscale avait, déjà, été mise à mal par la loi de finances 2024, avant que le Conseil d'État ne retoque la mesure. La députée Renaissance du Finistère, Annaïg Le Meur, appelait aussi à aligner les règles fiscales des Airbnb sur celles des locations longue durée, dans une proposition de loi déposée mi-juillet. Avec cette mesure, le gouvernement pourrait récupérer 200 millions d'euros.
Un petit sursis pour le Pinel ?
Possible. Le dispositif Pinel permet aux particuliers qui investissent dans des logements neufs ou à rénover de bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu moyennant leur mise en location. Son arrêt, prévu le 31 décembre, pourrait finalement être légèrement reporté, selon BFM Business. En clair, « les investisseurs devront avoir enregistré la réservation du logement neuf avant le 31 décembre 2024, mais ils auront jusqu'au 31 mars 2025 pour boucler l'achat devant notaire ». Selon la Cour des comptes, ce dispositif a coûté 7,3 milliards d'euros depuis son lancement il y a 10 ans.
Indemnisation des arrêts de travail et remboursement des consultations modifiés
Possible. Avec 16 milliards d'euros de déficit pour 2025, le gouvernement cherche à soulager les finances de la Sécurité sociale. Il envisagerait de baisser l'indemnisation des arrêts de travail par l'Assurance Maladie, selon Les Echos, en abaissant le plafond d'indemnisation de 1,8 à 1,4 Smic. Les salariés en arrêt de travail touchent actuellement 50% de leur salaire brut, au bout du quatrième jour consécutif d'arrêt. Cette indemnité peut aller jusqu'à 52 euros brut par jour, pour les salariés qui touchent au moins 3 180 euros brut (1,8 Smic). La Sécu pourrait, avec cette mesure, économiser 600 millions d'euros.
Le gouvernement pense également à abaisser de 70% à 60% le montant du remboursement de la Sécu d'une consultation médicale. La part prise en charge par les complémentaires grimperait de 30% à 40%. Pour une consultation de 30 euros (tarif en vigueur au 1er décembre 2024), la Sécu ne prendrait plus en charge que 18 euros, contre 21 euros. Cette mesure permettrait d'économiser 1,2 milliard d'euros.
Les autres pistes
Pour les entreprises. Les 300 plus grandes vont payer une surtaxe pendant un ou deux ans. Le gouvernement envisage, par ailleurs, d'augmenter les cotisations sociales, de raboter l'aide à l'embauche pour l'apprentissage, de rogner sur le crédit impôt, ou encore d'instaurer une taxe sur le rachat d'actions.
Pour les compagnies aériennes et les jeux d'argent. La taxe de solidarité sur les billets d'avion (TSBA) va augmenter d'1 milliard d'euros, soit trois plus qu'actuellement. In fine, cette hausse devrait se répercuter... sur le prix des billets. Du côté des jeux d'argent, les prélèvements sociaux devraient être augmentés pour les loteries, paris sportifs et casinos. Un gain de 500 millions d'euros par an pour la Sécurité sociale.
Pour l'État et les collectivités territoriales. Le gouvernement compte trouver 20 milliards d'euros d'économie dans les dépenses de l'État. Le gel des crédits des ministères rapportera 15 milliards, tandis que des efforts supplémentaires, avec des baisses d'effectifs, permettra une économie de 5 milliards d'euros. Du côté des collectivités territoriales, les efforts demandés permettront de rapporter « entre 5 et 7 milliards d'euros », selon Sébastien Martin, président d'Intercommunalités de France.