Se pacser pour échapper à l'impôt ? Mauvaise idée, rappelle l'administration fiscale. Dans un avis rendu le 11 septembre 2025, le Comité de l'abus de droit fiscal (CADF) a confirmé la fictivité d'un pacte civil de solidarité conclu entre un employeur et son assistant de vie, estimant qu'il ne visait qu'à contourner les droits de succession. À la clé : une lourde taxation à 60% et une majoration de 80%.
L'affaire remonte à 2019. Un homme de 81 ans, lourdement handicapé depuis 2012, conclut un PACS notarié avec son assistant de vie, qu'il désigne simultanément légataire universel. À son décès, en 2021, le partenaire survivant hérite de l'ensemble du patrimoine sans verser le moindre droit de mutation, profitant de l'exonération totale prévue par l'article 796-0 bis du Code général des impôts (CGI). Mais après contrôle, le fisc s'étonne : les deux hommes n'ont jamais réellement vécu ensemble. Or, en droit, les partenaires s'engagent à une vie commune.
Des indices accablants
Pour étayer sa position, l'administration s'appuie sur un faisceau d'indices. D'abord, les partenaires ont conservé des résidences distinctes malgré la mention d'une adresse commune dans le PACS. Les déclarations de revenus, et les bulletins de salaire de l'assistant indiquent tous son ancien domicile. De plus, les factures d'énergie du défunt ne démontrent aucune hausse de la consommation après la conclusion du PACS. Le Comité constate aussi que ce dernier a, dans un premier temps, déclaré le logement du défunt comme résidence du couple lors de la succession pour bénéficier d'un abattement de 20%, avant de se rétracter.
Autre point déterminant : le lien professionnel entre les deux hommes. L'assistant était salarié du défunt depuis 2013. Or, rappelle le Comité, les partenaires pacsés s'engagent à une aide matérielle et une assistance mutuelle (article 515-4 du Code civil). Pourtant, les missions exercées – soins, accompagnement, présence constante – correspondaient précisément à cette obligation d'assistance. En d'autres termes, le contrat de travail rémunérait des prestations censées découler du PACS, signe que le lien contractuel n'avait pas de réalité conjugale.
Une sanction exemplaire
Le Comité conclut donc que le PACS avait été contracté dans un but exclusivement fiscal, pour profiter d'un régime de faveur en matière de succession. Il approuve la mise en œuvre de la procédure d'abus de droit prévue à l'article L.64 du Livre des procédures fiscales : le partenaire survivant devra régler près de 489 000 euros de droits, assortis d'une majoration de 80% pour manœuvres frauduleuses.
Cette décision vient rappeler qu'un PACS ne peut servir d'outil d'optimisation successorale. S'il ouvre bien droit à une exonération totale entre partenaires lorsqu'il existe un testament, celle-ci suppose une union réelle : résidence commune, vie partagée, engagements réciproques. En l'absence de ces éléments, l'administration peut requalifier l'opération et appliquer la fiscalité entre non-parents, soit 60% de droits de mutation.
Le fisc plus attentif aux « PACS de circonstance »
Ce rappel intervient dans un contexte de vigilance accrue de la part de Bercy face aux montages artificiels. Depuis la réforme de 2019 sur l'abus de droit « à motif principalement fiscal », le fisc peut contester toute opération dont la motivation dominante est la réduction de l'impôt, même si elle respecte formellement la loi.
Le message est clair : le PACS reste un contrat civil avant tout, pas une stratégie patrimoniale. « Il ne peut être utilisé pour atteindre un résultat étranger à ses objectifs », rappelle le Comité. De quoi inciter les contribuables à la prudence : en matière de fiscalité conjugale, les unions de façade peuvent coûter cher.