L'Autorité des marchés financiers a requis jeudi  1,05 million d'euros d'amendes contre la biotech Pharnext et deux ex-dirigeants dans une affaire de manipulation de marché par diffusion d'informations trompeuses ou fausses, et communication tardive d'informations privilégiées sur un candidat-médicament contre la maladie de Charcot-Marie-Tooth.

Le gendarme boursier français a demandé 700.000 euros d'amende contre la biotech française Pharnext, placée en liquidation judiciaire en août, et respectivement 200.000 euros et 150.000 euros contre les anciens directeurs généraux de la société, Daniel Cohen et David Horn Solomon.

La société Pharnext n'a pas communiqué dès que possible l'information selon laquelle l'Agence américaine du médicament (FDA) lui aurait demandé en mars puis en avril 2019 de faire une étude complémentaire pour le PXT3003, son candidat-médicament contre la maladie rare de Charcot-Marie-Tooth de type 1A, d'après le rapporteur de l'AMF. Un incident en 2017 avait imposé l'arrêt de l'essai clinique sur les patients exposés à de hautes doses, précise-t-elle, une partie seulement des résultats nécessaires ayant ainsi été recueillis.

Selon la FDA, l'étude clinique de phase 3 apparaissait « clairement incapable d'apporter des preuves substantielles de l'efficacité du PXT3003 », a argué le rapporteur en citant un document de l'agence américaine. Pharnext a attendu « plus de 4 mois pour publier une information privilégiée », a-t-elle insisté. Rien qu'avec ce retard, l'AMF a estimé à plus de 2 millions d'euros de préjudice pour le total des actions achetées entre la date où les informations privilégiées n'ont pas été publiées et la date de divulgation.

Daniel Cohen, « écorché par cette mise en cause », a argué que la demande de la FDA n'était pas suffisamment claire et précise sur la nouvelle étude demandée, notamment s'il devait s'agir d'une étude de phase 3 qui intervient avant la commercialisation d'un médicament, « une mauvaise nouvelle », ou une étude de phase 4 après la mise sur le marché qui suit le calendrier habituel. « L'imprécision était telle, l'instabilité était telle, que je n'avais rien à dire au marché », a-t-il affirmé.

Dans un second temps, Pharnext avait demandé une évaluation spéciale du protocole de son nouvel essai clinique (« special protocol assessment » ou SPA en anglais), un processus volontaire par lequel le promoteur d'un médicament peut échanger de sa propre initiative avec la FDA pour lui soumettre le schéma expérimental qu'il compte suivre.

Pharnext s'est vu opposer un refus de la FDA, dans une réponse motivée. « Pharnext n'évoque pas ce refus et parle même d'un résultat positif », a souligné le collège de l'AMF, parmi d'autres informations fausses ou trompeuses diffusées ayant pu avoir une influence sur le cour de l'action de la biotech.

Or, Pharnext avait « communiqué publiquement sur le dépôt du SPA » et avait ainsi « créé une attente légitime du marché sur ses échanges avec l'autorité américaine ». L'avocat des deux anciens dirigeants a argué que la FDA avait seulement opposé un refus à une « partie résiduelle » du protocole. La décision de l'AMF est attendue en décembre.