Question de Sara, le 13 mars :
« J'ai bien du mal à m'y retrouver avec toutes ces fausses ou mauvaises interprétations de la loi. Je viens de demander sur un forum juridique si la loi de programmation militaire de 2023 avait un alinéa permettant la saisie sur les comptes des Français. Un avocat me répond non. Pas de saisie automatique. Mais en cas de guerre, il pourrait y a voir une réquisition des biens et des services. Alors, moi, je comprends que cet avocat se contredit (...). Qu'en dites-vous ? »
Bonjour Sara, merci pour votre question. Elle rejoint de nombreuses interrogations des lecteurs de MoneyVox sur l'utilisation de l'épargne des ménages pour financer la défense dans le contexte de crise géopolitique et de réarmement de la France et de l'Europe.
Fin février, Emmanuel Macron a évoqué le lancement de « produits d'épargne » pour accroître les investissements de défense dans le contexte de guerre en Ukraine. Ce jeudi, une réunion doit d'ailleurs se tenir à Bercy avec les ministres de l'Économie, Eric Lombard, et des Armées, Sébastien Lecornu, qui réuniront des investisseurs privés et des industriels de la défense afin de mobiliser des financements pour ce secteur.
Dans ce cadre, les Français pourraient choisir de flécher l'utilisation d'une partie de leur épargne vers des entreprises du secteur de l'armement en choisissant de souscrire à des unités de compte via leurs assurance vie et ou plans d'épargne retraite, par exemple. Il s'agit uniquement de flécher l'usage de cet argent ainsi épargné dans votre banque ou chez votre assureur : il n'est pas question d'une réquisition ou d'une appropriation de cet argent par l'État.
D'autres pistes sont évoquées, comme l'orientation d'une partie des fonds du Livret A, le lancement d'un emprunt national ou la création d'un livret d'épargne dédiée. Mais ces idées n'auraient pas les faveurs du gouvernement.
Placement : les Français refusent que l'argent de leur Livret A finance la défense
Que dit la loi de programmation militaire ?
Pour autant, ces derniers mois, sur les réseaux sociaux, certains en déduisent que l'État va « piquer » les économies des Français. Et qu'il pourrait ainsi se les approprier grâce à la loi de programmation militaire 2024-2030 entré en vigueur le 1er août 2023. Or Sara, soyez rassuré, ce n'est pas le cas. Le ministère de l'Économie a d'ailleurs assuré à l'AFP qu'il était « hors de question de confisquer l'épargne de qui que ce soit ».
« Hors de question de confisquer l'épargne de qui que ce soit »
L'article 2212-1 du code de la Défense modifiée par la loi de programmation militaire indique : « En cas de menace, actuelle ou prévisible, pesant sur les activités essentielles à la vie de la Nation, à la protection de la population, à l'intégrité du territoire ou à la permanence des institutions de la République ou de nature à justifier la mise en œuvre des engagements internationaux de l'État en matière de défense, la réquisition de toute personne, physique ou morale, et de tous les biens et les services nécessaires pour y parer peut être décidée par décret en Conseil des ministres. »
Placements, compte bancaire... L'Etat va-t-il vous faire les poches pour financer la défense ?
« L'objet des réquisitions reste le même »
Interrogé fin 2024 par l'AFP, Jean-Christophe Videlin, professeur de droit public et doyen de la Faculté de droit de Grenoble, explique qu'avec la réforme, « l'objet des réquisitions reste le même », à savoir qu'elles peuvent toujours être « immobilières (l'Etat peut prendre possession d'un immeuble ou d'une usine dans un intérêt national) ou mobilières (mobilières pas au sens d'“argent”, mais au sens de biens comme par exemple des véhicules, camions, trains, navires) ».
Et de rappeler que « la réquisition est une prise de possession pendant un temps donné, pas une prise de propriété ». A terme, le bien est rendu à son propriétaire moyennant une indemnisation.
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