En France, un foyer éligible au RSA sur trois « oublie » de réclamer le revenu de solidarité active à la CAF. Le pays est-il à la traîne face à ses voisins européens pour lutter contre ce non-recours aux minima sociaux ? Pas vraiment, à en croire une nouvelle étude de la Drees, qui pointe le « phénomène d'ampleur » du non-recours en France mais aussi en Allemagne ou en Belgique.

330 euros par mois, en moyenne : voici le montant que 600 000 ménages « oublient » de réclamer à la CAF selon une étude de la Drees, pôle statistique public dédié à la santé et au social. Au total, les sommes non-versées du fait du non-recours au RSA atteindraient 750 millions d'euros par trimestre, soulignait ainsi la Drees mi-février, en précisant que si une partie de ces foyers éligibles ne sont que temporairement écartés du RSA, pas moins de 20% sont durablement touchés par ce non-recours.

CAF : un paiement de 330 euros par mois que vous oubliez (peut-être) de réclamer

Y a-t-il quelque chose qui cloche, en France, pour ces foyers écartés des minima sociaux, faute d'information suffisante ou faute d'assistance dans les démarches administratives ? La Drees revient sur l'épineux sujet des minima sociaux en ce mois de mars. Avec un angle d'attaque différent cette fois : « quantifier le non-recours aux minima sociaux en Europe » et donc comparer la France à ses voisins.

Constat global : « Complexe à quantifier précisément, le non-recours au revenu minimum atteint fréquemment des niveaux supérieurs à 30% dans les 5 pays observés », c'est-à-dire l'Allemagne, la Belgique, la Finlande, le Royaume-Uni et la France. Pour cette étude, la Drees s'est penchée sur les « prestations proches du Revenu de solidarité active en France ».

34% en France, 29% en Finlande, 35% ou 56% de non-recours en Allemagne selon la méthode utilisée, et pas moins de 62% de non-recours au revenu d'intégration social en Belgique (mais ces 62% datent de 2005). Le Royaume-Uni fait figure d'exception avec seulement 10% de non-recours à une prestation versée sans condition, mais grimpe en revanche à 44% pour une autre prestation conditionnée, elle, à une recherche effective d'emploi.

Sans se risquer à juger les politiques publiques en la matière, la Drees souligne en revanche la difficulté méthodologique pour mesurer ce non-recours, ce qui illustre aussi la difficulté de lutte face à ce phénomène pour les pouvoirs publics. Or « la quantification du non-recours et l'identification de ses causes sont des enjeux majeurs : elles permettent d'affiner la connaissance des leviers pour lutter contre ce non-recours ».

La Drees s'étonne ainsi ouvertement dans cette étude que le « phénomène d'ampleur » du non-recours aux minima sociaux « peine à susciter le débat ». Dans le cadre de l'élection présidentielle 2022, le président-candidat Emmanuel Macron a ressorti le chantier de la « solidarité à la source », déjà évoquée en 2017. Verser les aides sociales de façon automatique est en effet un moyen de lutter contre le non-recours. Cette fois, ce « phénomène d'ampleur » pointé par la Drees va-t-il s'ancrer dans le débat public ?

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