Une nouvelle mesure censée permettre d'économiser des milliers d'euros sur votre prêt immobilier doit être examinée mercredi au Sénat. Mais rien n'est encore gagné.

La pression monte. Mercredi, le Sénat examine en séance publique la proposition de loi « pour un accès plus juste, plus simple et plus transparent au marché de l'assurance emprunteur » déjà votée à la quasi-unanimité à l'Assemblée en novembre. Portée par la députée Patricia Lemoine (groupe Agir, composante de la majorité), elle prévoit d'introduire davantage de concurrence afin de faire baisser le coût de l'assurance d'un crédit immobilier.

A l'heure actuelle, il est souvent plus important que le montant des intérêts à payer. Pour faire des économies, il est en théorie possible de refuser l'assurance de la banque et ainsi gagner jusqu'à 15 000 euros sur un emprunt de 200 000 euros ! Mais les assureurs alternatifs accusent les banques, qui détiennent près de 90% du marché, de faire obstruction empêchant leurs clients de trouver moins cher ailleurs. La proposition de loi veut autoriser les particuliers à changer d'assurance emprunteur, sans frais, à tout moment et plus seulement à la date anniversaire du contrat.

L'interview de Patricia Lemoine : « La réforme de l'assurance emprunteur va rendre du pouvoir d'achat »

Mais les sénateurs, majoritairement de droite, ne l'entendent pas de cette oreille. Mercredi 18 janvier, ils se sont opposés à ce texte estimant que l'équilibre actuel « fonctionne » et a conduit « à une baisse effective des coûts » pour les assurés, selon les mots du rapporteur du texte au Sénat Daniel Gremillet (LR). Ce dernier et ses collègues de la majorité préfèrent renforcer l'information des assurés. L'assureur aurait notamment l'obligation d'informer chaque année son client de son droit de résiliation mais aussi des modalités de sa mise en œuvre. La notion de « date d'échéance », à partir de laquelle est calculée la période durant laquelle l'assuré est autorisé à résilier son assurance serait ainsi clarifiée.

« 550 millions d'euros de pouvoir d'achat par an »

« Stupéfait » par le vote des sénateurs, Eric Maumy, directeur général du courtier grossiste en assurance April, dit avoir « beaucoup de mal à comprendre que le Sénat puisse devenir le porte-parole de banquiers contre les consommateurs, qui pourraient gagner 550 millions d'euros de pouvoir d'achat par an si la mesure était adoptée ». Un chiffrage avancé par l'UFC-Que Choisir et que l'association de consommateurs remet en avant ce mardi dans un communiqué intitulé « Une occasion historique pour le Sénat de libérer du pouvoir d'achat ».

Elle y dénonce « l'échec patent » des différentes mesures prises depuis 2010 pour stimuler le marché de l'assurance emprunteur. Et ce à double titre : « D'abord parce que pour ne pas avoir à améliorer le contenu de leurs garanties, les banques présentent encore trop souvent l'assurance comme accessoire à l'achat immobilier... (et donc)... les contrats alternatifs sont généralement de meilleure qualité avec entre autres des délais de franchise réduits, souligne l'UFC. Ensuite parce que profitant de ce manque de transparence, les banques continuent de proposer des contrats plus chers, et qu'elles n'acceptent de s'aligner sur les prix de la concurrence qu'avec leurs clients les plus avertis, notamment les cadres et les plus jeunes. »

Crédit immobilier : combien gagner chaque mois en refusant l'assurance de sa banque ?

Une surprise de dernière minute ?

Interrogée par MoneyVox, l'auteure de la proposition de loi, la députée Patricia Lemoine, se dit « attristée », par la position actuelle du Sénat qui à ses yeux fait de son texte un enjeu politique à l'approche de la présidentielle : « Il y a fort à parier que la majorité sénatoriale ne souhaite pas faire le cadeau à la majorité gouvernementale d'une mesure qui permettrait de redonner du pouvoir d'achat au ménage sans que cela coûte un euro à l'Etat. »

Si les sénateurs restent en séance sur leur version, et qu'ensuite députés et sénateurs ne parviennent pas à un compromis en commission mixte paritaire, une deuxième lecture du texte dans les deux chambres est prévue. C'est l'Assemblée nationale qui, au final, aura le dernier mot lors d'une troisième lecture.

Sauf que l'activité des députés et des sénateurs se termine fin février en raison de l'élection présidentielle d'avril. Le timing est donc très juste pour envisager une issue favorable du texte avant la fin du quinquennat, selon la députée. Celle-ci table encore sur une issue favorable de dernière minute : « J'espère que la grande sagesse des sénateurs reprendra le dessus ».

Economisez sur l'assurance emprunteur