A la veille de la déclaration de politique générale de Michel Barnier, une hausse temporaire de l'impôt sur les grandes sociétés semble être étudiée pour combler un peu un déficit public qui dépassera 6% du PIB cette année.

Selon un document consulté par le journal Le Monde, le gouvernement étudie une telle hausse du taux de l'impôt sur les sociétés (IS) allant jusqu'à 8,5 points, pour les entreprises réalisant plus d'un milliard d'euros de chiffre d'affaires annuels. Cela pourrait rapporter jusqu'à 8 milliards d'euros, selon le quotidien.

Qu'est-ce que l'impôt sur les sociétés ?

Cet impôt est payé par les entreprises sur leurs bénéfices réalisés en France, qu'elles soient françaises ou étrangères. Depuis l'arrivée d'Emmanuel Macron au pouvoir, le taux de l'IS est passé progressivement de 33,3% à 25%, dans le cadre d'une « politique de l'offre », destinée à favoriser le développement des entreprises, et, par voie de conséquence, l'emploi.

A 25%, le taux français reste cependant supérieur à la moyenne des taux constatés dans les 150 pays de l'OCDE, qui est de 21%, selon l'organisation. Dans le projet de loi de Finances 2024, les revenus nets de l'IS étaient prévus à 72,2 milliards d'euros, contre 94,1 milliards pour ceux de l'impôt sur le revenu, ou 100,4 milliards pour la TVA.

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Pourquoi viser l'IS ?

Alors que le pouvoir d'achat est en tête des préoccupations des Français, pas question pour Michel Barnier « d'alourdir encore l'impôt » sur « les gens les plus modestes, ni sur les gens qui travaillent, ni sur les classes moyennes », a-t-il déjà fait savoir. En revanche, il a indiqué « ne pas exclure que les personnes les plus fortunées participent à l'effort national », via des « prélèvements ciblés » qui toucheraient aussi « certaines grandes entreprises ».

Qu'en pensent les principales intéressées ?

Le Medef, qui représente largement ces grandes entreprises, semble se préparer à une telle contribution. « Nous sommes dans une attitude constructive à l'égard de ce gouvernement, car nous sommes conscients que la situation des finances publiques est très grave et l'équation politique fragile », a déclaré son président Patrick Martin.

Mais le Medef mettrait « deux conditions » à une telle hausse d'impôt : que l'Etat fasse sur « l'excès de dépenses publiques » des efforts « bien supérieurs à ce qu'il demande aux entreprises ». Et que cette taxation supplémentaire « n'enraye pas la dynamique d'investissement et de création d'emplois dans une conjoncture économique très fragile ».

Le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, consulté à titre d'expert lors du séminaire gouvernemental de vendredi, selon Le Monde, s'est dit récemment favorable à « un cocktail bien proportionné », à raison de « trois quarts et un quart » des baisses de dépenses et des hausses d'impôts.

Le premier président de la Cour des comptes, Pierre Moscovici, s'est dit lui aussi favorable à « des gestes exceptionnels » de la part de grandes entreprises, plutôt gâtées fiscalement ces dernières années. Pour Jean-Yves Mercier, vice-président du Cercle des Fiscalistes, une telle hausse de l'IS serait à la fois « le plus simple, le plus rentable et le moins perturbant » pour les entreprises, « qui en ont l'habitude ».

Le premier gouvernement Macron lui-même avait procédé à une hausse ponctuelle et ciblée de l'IS dans une loi de finances rectificative fin 2017.

D'autres recettes à attendre des entreprises ?

Dans des rapports de mars, l'Inspection générale des Finances (IGF) étudie des pistes d'économies à faire sur les entreprises. Elle s'est ainsi penchée sur les 380 dispositifs, représentant quelque 88 milliards d'euros d'aides aux entreprises, financées en 2022 par l'Etat et les organismes de Sécurité sociale.

Elle a suggéré, par exemple, un rabotage du financement des Chambres de commerce et d'industrie, du crédit impôt recherche (CIR) ou des exonérations du pacte Dutreil sur la transmission d'entreprises familiales. L'IGF a suggéré aussi de moins subventionner l'apprentissage pour les entreprises les plus importantes et les apprentis des niveaux d'étude les plus élevés.