L'espérance de vie, l'espérance de vie en bonne santé et l'âge de départ en retraite varient de manière importante et inégalitaire selon les professions en France, selon une analyse conjointe de chercheurs de l'Ined, du CNRS et de l'Inserm.

En France, l'espérance de vie est l'une des plus élevées au monde et dépasse les 80 ans depuis le début des années 2000. Mais les différences d'espérance de vies entre catégories socioprofessionnelles sont également « très fortes, parmi les plus grandes en Europe », expliquent Emmanuel Cambois (Ined), Thomas Barnay (CNRS) et Jean-Marie Robine (Inserm), dans le dernier numéro de la revue de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav) « Retraite et société ».

Différences importantes à l'âge de 50 ans

Ainsi, « à 50 ans, l'espérance de vie des professions les plus qualifiées atteint 32 ans pour les hommes, soit près de 5 ans de plus que celle des ouvriers. Pour les femmes l'écart est de 2 ans, avec une espérance de vie maximale pour les professions les plus qualifiées de 36 ans », notent les auteurs, qui synthétisent une série d'enquêtes antérieures.

Si l'on compare l'espérance de vie en bonne santé perçue (EVBS), c'est-à-dire sur une dimension objective de la santé de chaque individu, très souvent utilisée comme indicateur au niveau européen, les hommes de 50 ans qui ont une profession qualifiée peuvent espérer vivre 23 ans en bonne santé perçue, contre un peu moins de 14 ans pour les ouvriers.

Différences homme - femme

Cet écart d'EVBS est de 9 ans entre les femmes les plus qualifiées et les ouvrières. Ces inégalités d'espérance de vie en bonne santé selon la profession persistent même après le départ en retraite, soulignent les auteurs.

De plus, les inégalités sont liées à l'occupation: ainsi 25 à 28% des quinquagénaires en emploi s'estiment en mauvaise santé, contre 40% des chômeurs qui recherchent un emploi et 75% des inactifs.

Par ailleurs, plusieurs études ont montré « un lien fort entre profession et état de santé ». De plus, l'état de santé influence fortement la décision de partir en retraite anticipée, et de manière très inégalitaire selon les catégories socioprofessionnelles.

Notamment pour les ouvriers, dont la dégradation des conditions de santé est plus élevée que pour les autres catégories, mais pour qui le choix de partir en préretraite est particulièrement coûteux. Pour eux, l'arbitrage est davantage lié à l'état de santé qu'à des raisons personnelles, contrairement aux cadres.

Ces inégalités se retrouvent dans l'ensemble des pays européens, précisent les auteurs.