La réforme des retraites va entrer en vigueur au 1er septembre. Tous les départements de France métropolitaine et d'Outre-Mer sont concernés, à l'exception de Mayotte. Quel impact ont ces mesures pour les ultramarins ?

Si la réforme des retraites a suscité (et c'est toujours le cas) une forte contestation partout en France, y compris chez les ultramarins, elle entrera donc en vigueur le 1er septembre. Elles prévoit notamment de faire passer l'âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans d'ici à 2030.

Dans les départements d'Outre-mer, l'âge réel de départ à la retraite était déjà en décalage par rapport à l'Hexagone. En 2021, selon la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV), il s'échelonnait déjà entre 64,3 ans (à La Réunion) et 65 ans (en Guyane), tandis qu'il n'était que de 62,7 ans en Métropole. En reculant l'âge légal de départ à la retraite à 64 ans, les ultramarins devront-ils travailler forcément jusqu'à 67 ans pour bénéficier d'une retraite à taux plein ?

Le ministre du Travail Olivier Dussopt avait reconnu le 24 janvier dernier un départ plus tardif en Outre-Mer : « Je ne dis pas que c'est une bonne nouvelle parce que c'est le témoignage parfois de carrières hachées, a-t-il expliqué. Mais ce que je veux dire, c'est que nous veillerons dans ces territoires comme ailleurs à ce que la réforme s'applique le plus justement possible ». Il a a ensuite ajouté que « dans des territoires où l'âge effectif de départ est déjà supérieur au prochain âge légal d'ouverture des droits », l'application de la réforme aura « peut-être un caractère moins mordant ».

Les ultramarins travaillent plus longtemps pour des pensions moins élevées

Si l'âge de départ à la retraite des ultramarins est plus tardif qu'en métropole, c'est notamment lié au marché du travail plus restreint qu'en France métropolitaine. En conséquence, les Réunionnais ont eu plus de ralentissements et d'interruptions de carrière.

« Ainsi, fin 2016, seulement 41% d'entre eux ont eu une carrière complète , contre 62% des retraités de métropole », rapporte l'Insee dans une étude publiée en 2022.

Résultat, en 2016, la pension de retraite moyenne à la Réunion était 28% moins élevée qu'en métropole, s'élevant à seulement 1 160 euros brut par mois, selon l'Insee. D'autres facteurs expliquent ces inégalités coome le niveau de qualification, pointe l'Insee, mais aussi le salaire minimum aligné à la Réunion en 1996 sur le Smic national.

La situation à la Réunion est aussi applicable dans les autres départements d'Outre-Mer. Dans son étude sur « la grande pauvreté plus fréquente et plus intense dans les DOM », l'Insee précise que « beaucoup de ces retraités ont été confrontés au chômage, au temps partiel subi, voire au travail informel, entraînant ainsi des niveaux de pension réduits ».

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Les ultramarins sont ainsi plus nombreux en 2021 (54% à la Réunion, 47% en Martinique et en Guadeloupe et 39% en Guyane) qu'en métropole (35%) à bénéficier de la pension minimum de retraite. Même si celle-ci doit être revalorisée dans certains cas jusqu'à 1 200 euros bruts, les ultramarins doivent faire face à un coût de la vie très élevé.

Selon l'Autorité de la Concurrence, « le niveau général des prix à la consommation est de 7% à 12,5% plus élevé dans les départements d'Outre-mer ».

Anne-Sophie Alsif, cheffe économiste au cabinet BDO France, interrogée Outre-Mer la 1ère, craint une « double peine » pour les ultramarins : « Vous avez 10 ans d'écart [d'espérance de vie] entre les cadres et les ouvriers, et en effet dans les territoires d'Outre-mer vous avez des personnes qui sont moins qualifiées ».

Les avantages des retraités de la fonction publique dans les départements d'Outre-mer

Être agent de la fonction publique natif des départements d'Outre-mer et être fonctionnaire muté dans les DOM, ce n'est pas la même chose. Et pour cause, les derniers bénéficient de plus d'avantages que les premiers. Zoom sur ce que rapporte d'être fonctionnaire dans un petit coin de paradis.

  • Les fonctionnaires originaires ou mutés dans les DOM bénéficient d'une sur-rémunération, c'est-à-dire une majoration de leur salaire brut qui atteint 40% en Guadeloupe, Guyane, et Martinique et 54% à La Réunion. Une mesure justifiée par la différence de coût de la vie avec l'Hexagone. Cette sur-rémunération accroît leurs droits à la retraite, celle-ci étant comprise (à hauteur de 25%) dans le calcul des cotisations.
  • Le fonctionnaire en Outre-mer bénéficie d'un avantage supplémentaire de bonification à la retraite. Pour chaque période de 3 ans passée en Outre-mer, il reçoit un an de bonification de sa durée de cotisation nécessaire pour percevoir une retraite à taux plein.
  • Pour ce dernier avantage, seuls les retraités de la fonction publique d'État sont concernés. Ils bénéficient d'une indemnité temporaire de retraite (ITR), là aussi mise en place pour compenser le coût de la vie en Outre-mer. En 2018, l'indemnité atteint 8 000 euros dans tous les départements et régions d'Outre-mer (DROM). Voué à disparaître, l'ITR perd depuis 800 euros chaque année jusqu'à disparaître définitivement en 2028.

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