Les restaurateurs se sont vivement opposés, mercredi, à la possible extension en 2025 de l'utilisation des titres-restaurant pour faire ses courses alimentaires, estimant que cela pénaliserait le « fait maison », selon Thierry Marx, président de la première organisation patronale du secteur, l'Umih.

Il réagissait à des informations de presse, notamment de RMC, évoquant une décision « dans les prochains jours » sur l'extension de ce dispositif au-delà du 31 décembre 2024, voire une pérennisation. Les services de la secrétaire d'Etat à la Consommation, Laurence Garnier, ont confirmé à l'AFP que l'arbitrage devrait être rendu dans les prochains jours.

« Aujourd'hui par souci de solidarité, et on l'entend bien, on va laisser aller les titres-restaurant vers la grande distribution, 600 millions d'euros vers la grande distribution qui n'a pas besoin de notre travail pour faire des marges », a déploré le chef étoilé lors d'une conférence de presse au côté de Catherine Quérard, patronne du GHR, l'autre syndicat du secteur. « Les émetteurs (de titres-restaurant) sont pourtant d'accord pour travailler sur un titre d'alimentation durable » qui coexisterait avec le titre-restaurant, a-t-il poursuivi.

Un double plafond ?

Edenred, l'émetteur des Tickets-restaurant, a précisé à l'AFP que « sur le principe », le groupe « n'est pas pour la pérennisation de l'utilisation des titres-restaurant pour acheter n'importe quel produit alimentaire en grande surface ».

Le titre-restaurant est un « avantage social, destiné à bien s'alimenter pendant sa journée de travail. Il est donc important qu'à long terme, il reste ancré dans la restauration, pour que les entreprises continuent d'accepter de le financer », estime le groupe.

Edenred propose notamment d'instaurer un double plafond d'utilisation quotidienne, qui pourrait être de 30 euros au restaurant et 25 euros dans les grandes surfaces alimentaires. Le dispositif d'extension de l'utilisation des titres-restaurant, mis en place en 2022, permet aux détenteurs d'acheter des produits non directement consommables (farine, pâtes, riz, viande, etc.) dans les supermarchés.

La part des restaurateurs a reculé

Le précédent gouvernement, qui avait prolongé cette mesure jusqu'en 2024 dans un contexte de baisse du pouvoir d'achat, envisageait de la pérenniser dans le cadre d'une réforme prévue cet automne, qui prévoyait également d'instaurer la dématérialisation totale des titres-restaurant d'ici 2026.

Selon les calculs des professionnels, la part de marché des grandes et moyennes surfaces a progressé de 8,4 points alors que celles des restaurateurs a reculé de 6,4 points depuis l'extension de l'utilisation des titres-restaurant à tous les produits alimentaires. Dans un contexte de difficultés économiques pour le secteur, les restaurants menacés seront « remplacés par une industrialisation de notre métier, par moins de fait-maison », a alerté Thierry Marx.

L'Umih, le GHR et la CGAD - qui représente les artisans des métiers de bouche (boulangers, charcutiers, traiteurs, pâtissiers, bouchers...) - s'étaient opposés en début d'année à une proposition de loi sur le fait-maison, qui visait à signaler d'une mention « non fait maison » les plats non cuisinés sur place. « Pointer du doigt, ça n'a pas de sens. Nous réclamons une loi-cadre sur le fait-maison que nous porterons à l'Assemblée nationale », a indiqué Thierry Marx.

L'ancien député (Renaissance) Christopher Weissberg, rapporteur de la proposition de loi initiale (qui a finalement été retirée), a annoncé la semaine dernière sur sa page LinkedIn sa nomination comme directeur du développement international du groupe Bertrand (Hippopotamus, Burger King, Pitaya, Léon ou Au Bureau). « Une nomination scandaleuse », a jugé auprès de l'AFP le restaurateur Stéphane Manigold, partisan de la proposition de loi, dénonçant dans un courrier à Emmanuel Macron « un remerciement des plus choquants ».