Certains particuliers ont peu de choix pour leur fourniture de gaz ou d'électricité. Il s'agit de ceux qui vivent sur une zone desservie par une Entreprise locale de distribution (ELD). Ces zones représentent 5% du territoire, en France, et plusieurs centaines de milliers de foyers. Les 95% restants sont desservis par Enedis pour l'électricité ou GRDF pour le gaz.
Il existe aujourd'hui une vingtaine d'ELD en gaz et plus de 100 ELD en électricité, d'après le médiateur de l'énergie. Les zones plus importantes ? Pour l'électricité, plus de 370 communes du Bas-Rhin, dont Strasbourg (587 000 sites en décembre 2024), et pour le gaz, 46 communes de Gironde, dont Bordeaux (223 000 sites).
Moins d'offres disponibles
Principale conséquence, pour les consommateurs, moins d'offres disponibles, avec parfois la présence du seul fournisseur historique. Pour s'en rendre compte, il suffit de réaliser quelques simulations sur le comparateur du médiateur de l'énergie. Quand, à Rennes, un consommateur d'électricité (1) se voit proposer 80 contrats, pour les mêmes caractéristiques, à Grenoble, il n'aura que 9 offres à sa disposition.
Les propositions peuvent être encore moins nombreuses dans de plus petites communes. A Amnéville (Moselle), une seule offre, au tarif réglementé, ressort lors de la simulation. Même constat pour le gaz : 40 offres sont proposées à un consommateur Rennais (2), contre 3 offres pour un Bordelais, ou encore 10 offres pour les Grenoblois.
Peu de consommateurs ont donc souscrit à une offre chez un fournisseur alternatif. Côté gaz, « sur le périmètre des clients résidentiels, les fournisseurs alternatifs représentent entre 1% et 4% des consommations sur les zones des ELD », détaillait la Commission de régulation de l'énergie (CRE) dans son dernier observatoire des marchés de détail.
Idem pour l'électricité, « contrairement au périmètre d'Enedis, le développement de la concurrence reste toujours très limitée sur le segment résidentiel, avec une présence du fournisseur historique à plus de 99% chez de nombreuses ELD », indique-t-elle.
Pourquoi si peu ? « Si la trentaine de fournisseurs nationaux ne développe pas ses activités commerciales sur ces zones, c'est parce que les ELD sont nombreuses, desservent un nombre limité de clients, et que devenir fournisseur dans ces zones nécessite des développements techniques, notamment informatiques, souvent très importants », explique le médiateur de l'énergie.
Autre raison possible, le déploiement des compteurs Linky y est parfois moins avancé. Strasbourg électricité réseau indique par exemple que 62% du déploiement a été réalisé, alors qu'en comparaison, 96% des foyers sont équipés au niveau d'Enedis, selon le gestionnaire. Or, certaines offres ne sont ouvertes qu'aux foyers dotés de ces compteurs communicants. Par exemple, l'offre Tempo, ou encore les offres lancées récemment par les fournisseurs avec des super heures creuses, pour les propriétaires de véhicules électriques...
EDF, Ohm, Enercoop, TotalEnergies... Que valent les nouvelles offres « super heures creuses » ?
Arrivée timide de la concurrence
La CRE note tout de même que la concurrence semble se développer « timidement ». « Entre 2023 et 2024, les parts de marché en nombre de sites des fournisseurs alternatifs sur le segment résidentiel chez les six principales ELD sont passées en moyenne de 0,38% à 0,55%. » D'ailleurs, de nouvelles offres de fournisseurs alternatifs comme Ohm énergie, ou encore JPME ont fait leur arrivée dernièrement dans quelques ELD. Ekwateur et Yéli sont également présents pour certaines d'entre elles.
Toutefois, le prix de l'offre la moins chère continue à y être bien plus élevé. Par exemple, un consommateur utilisant 8 500 KWh d'électricité par an, avec une formule heures (1) à Rennes, a accès à la formule Tempo. Facture annuelle estimée : 1 584 euros par an. Autre option, une offre à prix fixe à 1 659 euros. A Grenoble, pour le même profil, l'offre la moins chère est estimée à 1 731 euros. A Amnéville, la seule offre disponible affiche une facture à l'année de 1 887 euros.
Pour le gaz, d'après nos simulations, la différence de prix va jusqu'à plus de 200 euros entre l'offre la moins chère dans une ELD et celle proposée dans le reste du territoire. C'est le cas entre Grenoble et Rennes : pour la première ville, l'offre la moins chère est estimée à 2 124 euros. Il s'agit d'une offre d'Ekwateur, dont les prix évoluent en fonction du marché de gros. A Rennes, la même offre proposée par le même fournisseur affiche une facture annuelle à 2 059 euros. Et l'offre la moins chère, indexée au prix repère du gaz, est estimée à 1 933 euros par an.
Un prix repère du gaz différent
Toutes les offres au tarif réglementé de l'électricité affichent les mêmes tarifs, ELD ou non. Pour le gaz, il n'existe plus de tarifs réglementés et le prix repère du gaz, indicateur publié tous les mois par la CRE, diffère dans ces zones. « Les coûts supportés par les fournisseurs sur ces zones ELD peuvent être différents de ceux s'appliquant à la zone couverte par GRDF, notamment en raison de différences de coûts d'infrastructure et de coûts commerciaux », explique-t-elle.
Par exemple, en juin, le prix repère moyen du KWh s'élevait à 0,11003 euro et l'abonnement annuel à 277,43 euros pour un usage chauffage, dans les régions desservies par GRDF. A Bordeaux, il est à 0,104 euro par KWh et l'abonnement à 356 euros. A Grenoble l'abonnement est fixé à plus de 400 euros et le prix repère moyen du KWh est à 0,131 euro.
(1) Utilisant 8 500 kWh d'électricité par an, avec une formule heures creuses et un compteur de 9 KVA, avec un ratio de consommation de 40% pendant les heures creuses et 60% durant les heures pleines.
(2) Utilisant 17 000 KWh de gaz par an.