Prime Macron = prime de partage de la valeur = nouvelle version de l'ex prime exceptionnelle de pouvoir d'achat. Cette prime accordée aux salariés au bon vouloir de l'employeur a plusieurs fois changé de formule. En cette campagne expresse de législatives anticipées, le Premier ministre Gabriel Attal promet un relèvement du plafond à 10 000 euros. Ça changerait quoi ?

Prime Macron, définition (dans sa version actuelle, en 2024)

Votre employeur peut décider de vous verser une prime de partage de la valeur (PPV), plus connue sous le nom de prime Macron, une ou deux fois dans l'année. Jusqu'en 2023, elle était défiscalisée. Ce n'est plus le cas depuis janvier 2024 : la prime Macron est soumise à l'impôt sur le revenu ainsi qu'à la CSG et la CRDS, sauf si vous travaillez dans une petite entreprise (moins de 50 salariés) et que vous gagnez moins de 3 fois le Smic.

Quel montant, à ce jour ? Potentiellement, votre employeur peut vous donner jusqu'à 3 000 euros de PPV, voire même 6 000 euros si un accord d'intéressement a été signé.

10 000 euros, prime défiscalisée, mensuelle, que promet Gabriel Attal ?

La promesse. « Demain, nous voulons permettre aux entreprises de mensualiser cette prime et ensuite nous proposons de relever nettement le plafond, à 10 000 euros par an », a déclaré le Premier ministre Gabriel Attal le jeudi 20 juin lors d'une conférence de presse. Sur le site du groupe « Ensemble » (Renaissance, Horizons, Modem, etc.) aux législatives 2024, le projet restreint de l'actuelle majorité présidentielle précise : « augmenter jusqu'à 10 000 euros par an sans charge ni impôt le montant de la prime de pouvoir d'achat qu'elles ont versée l'an passé à 6 millions de salariés ».

Qu'est-ce qui changerait ? Les évolutions telles qu'elles sont présentées ici tendraient en trois points :

  • Un plafond porté de 3 000 euros (ou 6 000 dans certains cas) à 10 000 euros.
  • Le retour de la défiscalisation totale, comme c'était le cas avant le 1er janvier 2024.
  • Un versement mensuel, plafonné tout de même à un cumul de 10 000 euros sur l'année, soit 833 euros maximum par mois. Aujourd'hui, le versement se fait en une ou deux fois.

Des changements suffisants pour relancer la « prime de pouvoir d'achat » ?

885 euros, en moyenne : c'est le montant moyen de la PPV en 2023 selon les statistiques dévoilées par l'Urssaf en mars dernier. Rappelons que l'an passé, cette prime était encore défiscalisée : 519 292 entreprises avaient ainsi profité de la prime Macron dans sa version favorable pour distribuer un bonus à leur salarié sans contrainte (cette prime ne répond pas un engagement contraignant comme c'est le cas pour l'intéressement par exemple) ni impôt.

Cette moyenne de 885 euros est plus élevée en 2023, suite à la hausse du plafond à 3 000 euros (ou 6 000, sous conditions), contre 806 euros en 2022 et surtout 401 euros en 2019, 590 euros en 2020 et 506 euros en 2021, avec un plafond qui était alors moins élevé : 1 000 euros maximum et 2 000 euros sous conditions. La hausse du plafond a ainsi permis d'accompagner une augmentation des montants... mais bien loin des maxima. Les montants distribués étant déjà loin des plafonds actuels, la hausse à 10 000 euros sera-t-elle efficace ? Rien n'est moins sûr.

En revanche, le retour de la défiscalisation sera très probablement couronné de succès : en quelques années d'existence, les meilleurs « scores » de la prime Macron ont systématiquement été liés à l'absence d'impôt. En témoigne l'effondrement des versements en 2024 : « 490 millions d'euros ont ainsi été versés aux salariés au premier trimestre 2024, soit nettement moins qu'au trimestre précédent (2,3 milliards d'euros) et qu'au premier trimestre 2023 (1,2 milliard d'euros) », a relevé l'Insee en mai dernier.

Montant de la prime de partage de la valeur en 2023Nombre et pourcentage de salariés bénéficiaires de la PPV
Moins de 100 €314 581 salariés5,3%
100 à 199 €456 0597,7%
200 à 299 €493 8448,4%
300 à 399 €479 7748,1%
400 à 499 €562 4619,6%
500 à 599 €615 16210,4%
600 à 699 €289 6544,9%
700 à 799 €299 9655,1%
800 à 899 €215 7143,7%
900 à 999 €189 2423,2%
1000 à 1999 €1 295 25022,0%
2000 à 2999 €353 3926,0%
3000 € ou plus323 7415,5%
Total5,9 millions de salariés bénéficiaires

Source : Urssaf

Des changements suffisants pour la généraliser ? Non. Ce dispositif reste facultatif dans les entreprises. Un peu moins d'une entreprise sur quatre, 24%, a eu recours à la prime de partage de la valeur en 2023, une année pourtant particulièrement faste pour la prime Macron, selon l'Urssaf.

La prime Macron vous prive-t-elle d'une véritable hausse de salaire ?

« Il y a un énorme problème : l'effet de substitution. C'est interdit mais cela existe quand même. Une étude de l'Insee l'a parfaitement illustré. Ce que vous ne donnez pas en augmentation de salaire cela passe par la prime Macron... » Ce constat, c'est l'universitaire Nicolas Aubert, spécialiste de l'épargne salariale et de l'actionnariat salarié, qui l'a dressé pour MoneyVox en janvier 2024.

L'Insee écrivait en effet, en mars 2023 : « La prime ne peut pas, en théorie, se substituer à des augmentations de rémunération ni à des primes prévues par un accord salarial ou par le contrat de travail. Cependant, l'analyse des dispositifs passés du même type montre qu'en l'absence de cette mesure, des employeurs auraient sans doute versé, sous une forme différente, une partie au moins du montant de la prime à leurs salariés. »

Prime Macron dans votre entreprise ? Pourquoi ce n'est pas forcément une bonne nouvelle

Or, une prime potentiellement boostée à 10 000 euros, totalement défiscalisée, et qui peut être échelonnée en 12 versements mensuels... pourrait clairement renforcer cet effet pervers déjà constaté : une prime qui prend la place d'une véritable augmentation de salaire.