La Commission de régulation de l'énergie (CRE) a publié lundi soir la première édition de son tarif « repère » ou de référence, censé prendre la place du tarif réglementé du gaz qui sera supprimé à compter du 30 juin. Ce nouvel outil doit permettre aux consommateurs de comparer les offres des fournisseurs dès juillet. Mais il a plusieurs limites.

Attendu depuis de longs mois, le tarif de référence de la Commission de régulation de l'énergie (CRE) a été publié ce mardi en fin de journée. Ce prix, baptisé finalement « repère », doit permettre d'adoucir la disparition fin juin du tarif réglementé du gaz (TRVG) pour des millions de consommateurs. La CRE confie même à MoneyVox « avoir déjà pu échanger avec les fournisseurs qui vont dans la majorité utiliser ce prix référence dans leurs offres futures. »

En clair, voici ce que préconise la CRE pour le début de mois de juillet. Ce prix repère, publié de façon mensuelle pour accompagner les consommateurs, comporte comme prévu un prix d'abonnement et un prix du kilowattheure. L'organisme indépendant propose ainsi un prix pour un foyer utilisant le gaz pour se chauffer, un prix pour un ménage qui cuisine au gaz et un prix pour une petite copropriété consommant 150 mégawattheures par an.

Des préconisations inférieures au tarif réglementé en vigueur

Le prix du kilowattheure de gaz est aujourd'hui facturé 0,1043 euros au TRVG pour un foyer qui se chauffe au gaz et 0,1284 euros pour un foyer « eau chaude et cuisson ». Pour conseiller les consommateurs, la CRE estime qu'une offre avec un prix de 0,09446 euros par KWh (chauffage) et de 0,11620 euros par KWh (eau chaude et cuisson) est acceptable. Côté abonnement, à date, Engie facture entre 102,12 euros et 249,84 euros euros par mois. La CRE présente de son côté un prix annuel compris entre 100,58 euros et 249,48 euros par an.

Prix repère de vente de gaz naturel pour juin 2023
Prix repère de vente de gaz naturel pour juin 2023 de la CRE

Selon cette grille de lecture de la CRE, les prix proposés pourraient ainsi baisser dès juillet, en comparaison du tarif réglementé en vigueur. Aujourd'hui, mis à part le fournisseur historique de gaz Engie avec son offre Passerelle, EDF et son contrat Avantage ou encore TotalEnergies, les offres des fournisseurs alternatifs à compter du 1er juillet sont floues.

« Le marché sera beaucoup plus concurrentiel »

« Les fournisseurs alternatifs vont se référer au prix de référence pour se positionner, ce qui régulera automatiquement le marché qui sera du coup plus concurrentiel », pense Adeline Jubert, référente énergie chez le courtier Meilleurtaux. De quoi ravir le Conseil d'Etat qui regrettait en 2017 que les tarifs réglementés du gaz soient contraires au droit européen dans la mesure où ils représentent une « entrave à la réalisation d'un marché concurrentiel. »

La méthodologie de calcul de ce nouveaux prix de référence suit en fait celle du tarif réglementé du gaz avec pour objectif de refléter les modalités de construction des offres de marché des fournisseurs. Ce prix proposé tient compte de « l'ensemble des composantes de coût de fourniture du gaz, coûts d'approvisionnement en gaz et coûts hors approvisionnement : coûts d'acheminement, coût de stockage, coûts commerciaux, marge, etc. », détaille la CRE.

Opposant historique à la disparition du tarif réglementé du gaz, l'association de consommateurs CLCV critique aussi le maintien de la formule de calcul du prix de référence, sensiblement proche du tarif régulé, qui utilise les prix mensuels du marché de gros - les plus fluctuants - à hauteur 80% de l'ensemble, laissant une part infime aux plus stables prix trimestriels et annuels. « On peut ainsi considérer que l'impact des prix de marché pourrait être plus lissé dans la formule de calcul comme cela est effectué dans le TRV électricité », écrit notamment l'association.

Les offres fixes exclues du dispositif

Autre limite du prix repère, les offres fixes ne seront pas concernées par ce prix de référence au grand dam des associations de défense des consommateurs. En effet, aujourd'hui, 52% des ménages qui consomment du gaz ont un contrat à prix fixe. Ce nouveaux prix référence ne leur sera donc pas utile pour choisir une nouvelle offre à prix fixe.

« Le tarif de référence ne protégera par le consommateur en tant que tel, car aucun fournisseur n'est obligé de proposer une offre à ce prix, contrairement au TRV du gaz. Toutefois, il constitue un repère pour le consommateur, d'une offre à un prix raisonnable et permet de le comparer à une offre à laquelle il va potentiellement souscrire », relativise Lucile Buisson, chargée de mission énergie au sein de l'UFC-Que Choisir.

« Tout va bien tant que les prix baissent », résume François Carlier délégué général de la CLCV. Les cours du gaz naturel ont nettement baissé depuis le pic de la crise à la fin de l'été 2022. Aujourd'hui, le mégawatt-heure (MWh) de gaz naturel livré en 2024 en France coûte moins de 50 euros/MWh, soit 6 fois moins qu'il y a un an. « Mais le jour où les prix montent, vous n'avez plus de garantie « , poursuit François Carlier. Le prix peut alors se mettre à flamber. Et peu importe qu'il soit repère, de référence ou complètement fou.

Autre limite à envisager pour ce nouveau prix de référence : sa publication mensuelle pourrait s'arrêter avec la fin du bouclier tarifaire prévu en décembre 2023, plongeant à nouveau les consommateurs dans l'incertitude.